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La Grèce peut-elle sortir de la zone euro ?

 

LePoint.fr de 23.01.2015

Les Grecs sont appelés aux urnes dimanche pour élire leur Parlement. Favori, le parti de la gauche radicale, Syriza, veut mettre un terme à l’austérité.
Par MARC VIGNAUD
Le spectre qui a tant fait trembler la zone euro sur ses bases en 2011-2012 ressurgit. Appelés aux urnes dimanche pour élire leur Parlement, les Grecs risquent fort de dire non au programme d’austérité qui leur a été imposé depuis 2010 et la découverte soudaine d’un déficit public abyssal jusqu’alors soigneusement caché sous le tapis par des politiciens inconséquents.

Selon les sondages, ils devraient placer en tête le parti de la gauche radicale, Syriza, qui ne veut plus laisser les créanciers (la Troïka, soit le Fonds monétaire international, la Commission européenne et la Banque centrale européenne) dicter la politique économique du pays. Son leader, Alexis Tsipras, a notamment promis à la population exsangue d’augmenter le salaire minimum de près de 30 % ou encore de négocier un effacement de la dette du pays désormais essentiellement entre les mains du FMI, de la BCE et des autres membres de la zone euro.

Incertitudes politiques
Relâchement des efforts entrepris depuis 2010, abandon d’une partie de la dette détenue par le contribuable européen, les partenaires du charismatique leader de 40 ans pourraient avoir du mal à avaler de telles conditions. Et être tentés par une sortie pure et simple d’Athènes de la zone euro, histoire de montrer aux autres pays tentés d’imiter la Grèce qu’ils ne céderont pas à un chantage. Au moins autant que l’Allemagne, la Finlande affiche son inflexibilité. Une partie de poker menteur devrait donc s’engager entre la Grèce et le reste de la zone euro.

Mais l’identité du joueur grec est encore loin d’être certaine. Si Syriza devrait logiquement arriver en tête dimanche soir, rien n’indique qu’Alexis Tsipras pourra former seul un gouvernement. Or, “il ne souhaite ni s’allier avec la Nouvelle Démocratie [la droite de l'actuel Premier ministre Antonis Samaras, NDLR], ni avec les socialistes, ni avec les communistes, ni avec les néo-nazis”, souligne François Cabau, économiste à la banque Barclays. La Constitution grecque lui accorde un délai de trois jours pour constituer une équipe majoritaire. En cas d’échec, le parti arrivé deuxième tente sa chance, et ainsi de suite. Avec la possibilité d’une nouvelle élection, comme en 2012, si les partis n’arrivent pas à se mettre d’accord. Le processus pourrait ainsi durer jusqu’à fin février-début mars.

Des besoins financiers à court terme

Même s’il gagne, Alexis Tsipras sera donc probablement obligé de mettre de l’eau dans son vin pour gouverner. “Les Grecs sont dans l’incapacité de se financer seuls. Or, leurs besoins pour 2015 sont supérieurs à 20 milliards d’euros”, rappelle Philippe Gudin, pour Barclays. Le nouveau gouvernement devra faire face à des échéances de remboursement de sa dette vis-à-vis du FMI mi-mars, puis vis-à-vis de la BCE à l’été, selon Barclays. Difficile d’imaginer qu’il ne rembourse pas l’institution internationale dirigée par Christine Lagarde. Depuis sa création en 1945, le fonds financé par nombre de pays du monde n’a jamais abandonné de créances. Quant à la BCE, elle n’a juridiquement pas le droit de financer les États. En clair, sauf à faire défaut de façon désordonnée et unilatérale, ce qui conduirait tout droit son pays à une sortie de la zone euro, le leader de Syriza devra demander à ses partenaires européens de remettre la main à la poche, tout en menant la renégociation de la dette détenue par les Européens !

“Ce qui m’inquiète un peu, c’est que les deux camps ont le sentiment, à tort, d’avoir plus de pouvoir de négociation qu’il y a deux ans. D’un côté, les Grecs se disent qu’ils ont un excédent budgétaire primaire, avant remboursement des intérêts de la dette. Ils pensent donc que s’ils arrêtent de rembourser, ils pourront toujours financer leurs dépenses sans avoir besoin de financements extérieurs”, explique Philippe Gudin. Sauf que si Athènes décidait de ne plus rembourser sa dette, son précieux excédent primaire se mettrait à fondre comme neige au soleil avec la fuite des capitaux et l’effondrement de l’économie que celle-ci engendrerait. “De l’autre côté, l’Europe est rassurée parce qu’elle a construit les pare-feu pour éviter la contagion. C’est faux aussi : si les marchés attaquaient l’Italie, qui a un vrai problème de soutenabilité de sa dette à 130 % du PIB, elle ne pourrait pas résister.”

Des sommets jusqu’à 4 heures du matin ?

Pour Jesus Castillo de Natixis, “les créanciers européens de la Grèce devront choisir entre une négociation qui conduira certes à des pertes mais d’un montant limité et connu, et un très grand désordre en cas de défaut de paiement unilatéral avec des conséquences difficiles à estimer”.

À plus de 177 % de la richesse annuelle créée (plus de 320 milliards d’euros), la dette grecque est en effet devenue un fardeau trop lourd à porter, même après les pertes infligées aux créanciers privés, en 2012, et les multiples concessions faites par les Européens sur les remboursements. Les autres États membres en sont conscients, eux qui se sont engagés auprès du FMI à alléger encore la charge des Grecs, s’ils réussissaient à dégager un excédent primaire. “Les principaux outils d’allègement de la dette avant une restructuration ont déjà été utilisés (allongement des maturités des prêts, baisse des taux d’intérêt, report de paiement des intérêts). De plus, ils ne font que repousser dans le temps la question du surendettement du pays”, prévient Jésus Castillo dans une note.

Pour Philippe Gudin, il faut de nouveau s’attendre à “avoir très peur, à des psychodrames, à des Eurogroupes qui durent jusqu’à 4 heures du matin”. Si le risque d’une sortie “par accident” de la zone euro n’est pas nul, “personne n’y a intérêt”. Pour la Grèce, cela signifierait en tout cas “une crise bien plus profonde et tragique celle que l’on vient de traverser. Cela se traduirait par un arrêt complet des flux de capitaux, un effondrement du secteur bancaire, de l’investissement et donc de l’ensemble de l’économie. On rentrerait dans une récession extrêmement profonde”. Les Grecs semblent en être conscients : ils sont massivement en faveur du maintien de la zone euro.

LePoint.fr de 23.01.2015

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